01 mai 2013
CONGRES ASSOCIATION DES DEPORTES INTERNES ET FAMILLES DE LA COTE D'OR 2013
Le 1°mai, l'A.D.I.F. de Côte d'Or a organisé son congrès annuel à la salle des fêtes de Comblanchien. Dans son rapport, le président Bernard Hähnel a insisté sur le devoir de mémoire perpétué par les anciens déportés auprès des écoles: participation aux cérémonies et au concours national sur la Résistance et l'Occupation, et transmission des idées et les espoirs des déportés morts pour notre liberté, pour éviter que se propagent, au travers de la crise économique, les idées nauséabondes qui nous ont tant fait de mal dans le passé.
Jacky Cortot a fait aussi une synthèse des douloureux évènements qui se sont déroulés le 21 août 1944.
Ensuite,les participants ont déposé une gerbe au monument commémoratif, et observé une minute de silence à la mémoire des victimes, et c'est dans une ambiance fraternelle et amicale qu'a été servi un frugal repas à la salle des fêtes.
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Intervention de Jacky Cortot au congrès annuel de l'Association des déportés internés et familles (ADIF) de Côte-d'Or à Comblanchien le 1er mai 2013
"Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'accueillir à votre congrès, dans notre village martyr. Vous êtes les gardiens de la mémoire, cette mémoire dont nous avons tant besoin, au moment où en Europe, à la faveur de la crise économique,ressurgissent les idées nauséabondes qui nous ont tant fait de mal dans le passé.
En Août 1944, j'avais 11ans et demi. Nous habitions une maison située à 2 pas d'ici, celle qui se situe après la cour de l'école, maison incendiée »e puis reconstruite. Nous étions locataire chez une famille de viticulteur.
Je vais revenir sur cette soirée du lundi 21 août 1944, mais avant, pour bien comprendre les motifs du drame, il faut faire un retour rapide dans l'histoire du village qui a forgé l'âme de Comblanchien et lui à aussi donné son essor.
Depuis nov. 1844, la commune de Comblanchien qui était très pauvre, loue des emplacements pour y ouvrir des carrières. Mais ce n'est que vers la fin des années 1870, début 1880 que les carrières connaissent un essor fulgurant.
En cette fin du 19° siècle, dans toutes les régions industrielles, c'est une révolution économique et sociale qui s'installe, engendrant de nombreuses revendications sociales par l'intermédiaire du syndicalisme naissant et d'un mouvement anarchiste. Ces revendications voulues par ce monde ouvrier ne sont pas du goût d'un patronat très 19° siècle, très retord à toute avancée sociale.
A la fin du 19° siècle, de nombreuses grèves, certaines parfois très longues, émaillées d'incidents violents éclatent à Comblanchien, qui, bien souvent est en état de siège, nécessitant l'envoi de forces de gendarmerie pour rétablir l'ordre. N'a-t-on pas construit une gendarmerie à Corgoloin pour surveiller officieusement les ouvriers de Comblanchien? Et plus tard les « terroristes » des années 1940.?
La presse de cette fin du 19° siècle fait largement écho à tous ces mouvements sociaux sociaux, et à cette violence qui en découle parfois
On commence d'être montré du doigt!
1936: lors des élections législatives Comblanchien surprend encore quant aux résultats. Ayant travaillé longtemps à Beaune, on m'a raconté, que lors des meetings électoraux, lorsque certains candidats prenaient la parole, on entendait siffler, taper et d'entendre: Ah !ce sont les carriers de Comblanchien !
En résumé, les luttes sociales nées à la fin du 19° siècle dans le milieu ouvrier des carrières vont cristalliser dans l'opinion un esprit revendicatif durant les années noires, et feront de Comblanchien, un village républicain et résistant.
Pendant les années qui vont suivre, Comblanchien sera marqué à l'encre rouge par les ennemis de cette 3°République honnie et par les les divers mouvements et partis de la collaboration qui vont travailler et renseigner les organisations de police allemande et française. Par exemple, selon des archives privées retrouvées par le professeur Vigreux, il y avait à Beaune, une vingtaine de personnes qui collaboraient avec la police allemande de la ville! C'étaient principalement des commerçants, des artisans, un marchand de vins, un huissier et surtout un buraliste. Ces gens là, vont donc prendre leur revanche pour notre cas, localement « et géneralement en accusant les dirigeants de la 3°République d'avoir entraîné la France des le deuxième conflit mondiale.
J'en viens donc maintenant aux évènements qui se sont déroulés au village deux années environs avant le drame du 21 août.
Comme par hasard, c 'est le 21 novembre 1941 que les polices française et allemande enquêtent sur les militants communistes de Comblanchien, sans succès. Mais vous allez voir que les Allemands et leurs complices ont de quoi, s'inquiéter!
Le 10 avril 1942, alors que le village est vide de soldats allemands depuis peu, un jeune militant communiste de 32 ans, André Lefils, comptable dans une maison de vins à Nuits Saint Georges est arrêté par les gendarmes de Corgoloin, alors qu'il lançait des tracts favorables à la Résistance entre les deux villages. Il est traqué depuis longtemps, mais son idéal l'emportent sur les avertissements et les dangers qu'il encourt. Le brigadier de gendarmerie, n'a-t-il pas juré de passer 50 nuits dehors s'il le fallait pour l'arrêter!! Dans cette brigade il est interrogé, et, selon la dernière lettre écrite à sa mère, il dit avoir été battu par 2 gendarmes dont il cite les noms. Son dossier est transmis au procureur à Beaune qui le transmet au Tribunal de guerre allemand qui siège 57 rue de la Préfecture à Dijon, où il est exécuté le 27 avril 1942.
Mais la résistance continue, sous une autre forme. Au mois de mai 1942, un jeune homme de Comblanchien âgé de 18 ans, Claude Henry,admirateur du Gl De Gaulle, d originaire de Lorraine, et dont les parents se sont installés à Comblanchien pour travailler dans les carrières, établit un premier contact avec d'autres camarades connus au lycée Monge à Beaune.
Au mois d'août 1943, il prend le commandement du secteur Nuits Saint Georges-Comblanchien. Extrêmement actif,et organisé, insouciant du danger, doué d'une intelligence hors norme,il réussit à faire homologuer par l'État-Major allié, un terrain de parachutage à Chaux. Les armes reçues sont entreposées à Comblanchien, derrière le mur du clos de la Maréchale, en face de chez lui, avec la complicité du vigneron. Il cache aussi des armes à Villers la Faye, dans les citernes vides du château féodal, occupé par la famille Donche-Gay.
En février 1944, les FFI sont unifiés, et Cl. Henry commande une compagnie avec le garde de lieutenant a dater du 15 avril 1944.
Malheureusement, il ne connaîtra pas les heures de la Libération, pour laquelle il avait tant combattu! Il sera abattu, avec son père Max qui l'assistait dans son combat, dans la maison familiale, au début de cette soirée du 21 août 1944, sous les yeux de sa mère et de sa sœur Claire âgée de 17 ans! ( J'y reviendrai..)
Il avait eu le temps de constituer un groupe de 10 sédentaires environ, originaire du village et des environs qui devait intervenir à l'approche des armées de la libération.
Au début de l'année 1944, le SD ( Sicherheitsdienst) allemand, police du parti, recrute des auxiliaires français pour infiltrer les milieux résistants. Un jeune homme originaire de Comblanchien A.B. 21 ans répond à l'appel. IL a passé une bonne partie de son enfance, chez ses grands parents, décédés, au début des années 1940. Son nom figure encore au recensement de 1936, le dernier avant la guerre. Il connaît donc bien les idées politiques dominantes au village, ainsi que ses parents qui militent comme lui à la Ligue française de Costantini. En cet été 1944, il squatte la maison vide des grands-parents,pour y exercer sa funeste activité. Et c'est lui qui va accompagner les Feldgendarmen de Beaune durant la nuit du 21 août. Il sera reconnu par des habitants. et il n'est pas seul
Des témoins affirment aussi avoir entendu parler français parmi les Allemands!
Mais voici, qu'au mois de mars 1944, une section d'une trentaine de soldats allemands vient s'installer au château Deslandes qui domine le village. Ces hommes font partie d'une compagnie de gardes-voies de communications, commandée par le capitaine Karl Schoning. Il a compétence pour un secteur allant de Gevrey-Chambertin à Santenay les Bains. Il a sous ses ordres le sgt-major Ratkje commandant la section de Comblanchien, et l'adjudant Leutbecher à Beaune. Cette compagnie collabore avec la Feldgendarmerie de Beaune. Ces Feldgendarmen connaissent bien Comblanchien, car ils viennent de temps à autres contrôler les dépôts d'explosifs nécessaires à l'exploitation de la pierre Ces dépôts, faciles d'accès, isolés, les inquiètent, et, en 1943, ils obligent l'ouverture d' un dépôt unique , situé route de Villers la Faye, dans une maison, et rendent le locataire responsable avec les menaces d'usage.
Cette section de gardes voies de communications était auparavant à Prissey, village voisin, et ils ont dit à la fermière qui habitait au bas du village, où ils allaient se ravitailler »Nous, partir à Comblanchien, village terroriste! »
Ils assurent des gardes le long de la voie ferrée, non sans faire quelques rapines dans les jardins et vergers qui longent la voie. La cohabitation avec les gens du village ne se passe pas top mal. Les deux parties s'ignorent.
Le 6 juin 1944, jour du débarquement allié en Normandie,.A Comblanchien, une autre résistance se fait jour. Maxime Salomon, originaire de l'Yonne, artisan tourneur sur pierre qui s'est installé en 1943 au village recrute 95 francs-tireurs qui vont constituer un groupe FTPF, branche armée du Front National créée par le PCF. À la fin 1941 Salomon deviendra commandant inter-régional pour la région D2.
Le 6 juin à 22 h ils ont rendez vous à Comblanchien au lieu_dit »La Perche à l'Oiseau », petite clairière située à l'orée de la forêt entre Comblanchien et Premeaux. Ils sont équipés par un dépôt d'armes, situé à 200 mètres de là, entreposées dans un trou du jardin de la maison située à côté de zone artisanale actuelle, à 150 m environ du château occupé par les gardes-.voies allemands Les armes proviennent d'un parachutage reçu par le groupe BOA de Ladoix-Serrigny, le groupe de M. Salomon ayant aidé à la réception de ces armes.
Le groupe va se fixer au fond de la combe du Puits de Groseille à Arcenant. Le 15 juin,le groupe est attaqué par 150 allemands et miliciens (Costantini). 6 maquisards sont tuès , deux sont de Comblanchien, Antoine Fiorèse et Ferruccio Borillo. Réné Trentini, très actif dans les milieux resistants ainsi que son père Louis est gravement blessé à la poitrine. L'assaillant se retire vers 18h. 18.30 avec 39 hommes tués et blessés, selon le journal de la Milice »L'Appel »
Dès l'été 1944, il y a environ 20 personnes du village qui font partie d'un groupe de résistance.
21 AOUT 1944
Nous voici donc arrivé à cette date fatidique. Le Comblanchien de la révolte des carriers à la fin du 19°siècle, des grèves de 1914, de 1936, le Comblanchien de la Résistance, le Comblanchien de toujours inquiète de plus en plus les Allemands. Ils ne connaissent pas de noms, ils veulent savoir, avant l'heure de la libération qui approche, et en finir une fois pour toute avec ce village de terroristes.
Le village est donc investi par les troupes de la Feldgendarmerie de Beaune (Manlay) entre 21 heures et 21.30 environ, qui procèdent à des contrôles, interventions parfois musclées ou brutales selon les hommes. Contrôles d'identité., des locaux. Dans certaines familles, où le chef de famille est absent (prisonnier, décédé) ils posent des questions: »nichts papa! Ils cherchent des hommes, des terroristes, mais n'en trouveront ^pas!
Il effectuent aussi quelques rapines, en ravitaillement : bouteilles d'eau de vie, de vins . Dans la grande rue, circule une traction citroen, dans laquelle on empile le butin. Et ce qui n' aurait pu qu 'être un simple contrôle va se transformer en quelques heures en une nuit tragique, dont je ferai le bilan toute à l'heure.
Vers 21h.35, 21.H40, une série de coups de fusils et armes automatiques assez courtes se font entendre, ceci en deux temps. Des habitants, qui n'étaient pas couchés sortent voir ce qui se passe. Selon deux témoins proche de la place du village, des soldats titrent en l'air, un autre, par contre,l'épaule appuyée contre l'angle du bâtiment, une école à l'époque,et situé à l'angle de la grande rue et de la rue nouvelle, tire en direction de l'extrémité de cette rue, où, déjà, une maison flambe, ainsi que la récolte non battue, d'une petite exploitation agricole voisine.
Comme je vous l'ai dit toute à l'heure, nous habitions dans cette rue, ma mère a ouvert la fenêtre d'une chambre,mais non les volets, orientée côté nord, , et nous pouvions entendre dans ce quartier bordant la RN 74 des bruits de verres brisés, des appels au secours, le tout dans un fracas épouvantable. Ce quartier va vivre une nuit d'épouvante où vont se mêler: incendie, et sang des victimes 4 sur 8 victimes dans le secteur.!
Mais revenons à ces premiers coups de feu qui ont marqué le début du drame. La version la plus plausible de cette tragique affaire, serait la suivante: souvenez vous de ce soldat vu par un témoin et tirant dans la direction de la rue nouvelle, eh bien, ce soldat tire sur ses compatriotes, des soudards, des incendiaires, des criminels, ivres de vengeance qui vont assouvir leur haine sur de paisibles habitants.
Ces hommes qui arrivent, déployés en tirailleurs, par chemins de vignes et de champs proviennent d'un train qui a stoppé en face du village, et sur lequel des individus , des écervelés, des illuminés auraient tiré,( conditionnel passé) .
Depuis 60 ans environ , des rumeurs de tir sur le train sont souvent évoquées, mais, avec le temps qui passe, des langues se délient, et il y a des oreilles qui traînent!. Par conséquent, les soldats du train ont cru à une attaque de résistants, et vont donc, comme je vous l'ai dit plus haut se venger sur le village, provoquant l'incompréhension des Feldgendarmen de Beaune, d'où échange de coups de feu, comme je vous l'ai dit plus haut.
Les gardes-voies du château, eux aussi, ont donné un coup de main à leurs amis Feldgendamen. Une version allemande dit que les soi disant terroristes se sont réfugiés dans les maisons et tirent depuis les fenêtres. sur les soldats. On croit rêver!
Déployés en tirailleurs, comme dit plus haut, ils arrivent à la lisière du village, se répartissent en petits groupes dans les rues ,voire sentiers, et commencer leur sinistre besogne.
Voici donc la synthèse des événements: 2 cas de figure:il y a les habitants, qui, dès l'audition des coups de feux ont quitté leurs maisons pour aller se cacher dans les vignes ou champs de cassis, et ceux qui vont être surpris dans leurs sommeil, où qui allaient se coucher! Pour ces derniers la situation a été la suivante:
Entrées brutales dans les logements aux cris de terroristes, terroristes, fouilles méthodiques des locaux, sévices corporels,et aussi vols de marchandises, bijoux précieux, nourriture et argent., et expédition manu militari sous bonne garde place de l'église? Pas le temps pour s'habiller, et pas question , non plus de faire quelques pas en arrière pour revenir chercher son porte-monnaie, laissé sur la table sans se faire matraquer par la crosse de l'arme ou le canon;
Telle était en général, la pratique employée par les soldats du train, qui souvent étaient ivres, et en tenue débraillée.
Rassemblée place de l'église, la population requise assiste à la tentative d'ouverture assez musclée , de la solide porte de l'église qui ne cède pas! Veulent-ils renouveler leur exploit d'Oradour sur Glane! On peut se le demander!
C'est alors que le sinistre cortège, solidement encadré, descend la rue de l'église, pour un nouveau rassemblement sur la place de la mairie, aujourd'hui: place du 21 août 1944.. Durant ce trajet, un jeune père de famille, son épouse, et leur petit garçon âgé de 18 mois, ainsi qu'un jeune de 17 ans, profitant d'un trou dans le mauvais grillage qui borde, en partie l'actuel parc municipal, à cette époque très
broussailleux, s'échappent du cortège; un coup de feu claque, personne n'est touché: ils sont libres.. un peu plus loin, c'est une grille restée ouverte qui permet à un jeune de s'évader, de détaler comme un lapin, et se cacher dans la vigne à côté.
Sur la place de la mairie, un tri s'opère, femmes et enfants sont mis de côté. 23 hommes sont choisis et devenir des otages:parmi eux ,deux jeunes de 14 ans et demi et 15 ans et des hommes de plus de 70 ans. Parmi eux un homme de 70 ans qui ne se nourrit que de lait va partir avec sa casserole: on peut deviner ce qu'est devenu le précieux breuvage!
Parmi eux, le cantonnier du village, Eugène Roussée, né dans cette partie de la Lorraine annexée après 1871, et qu'il a quitté en 1914, pour ne pas faire la guerre avec les Allemands. Et, dans sa jeunesse, il se souvient qu'il a appris l'allemand, et il demande à un gradé pourquoi ils « font ça » et de s'entendre répondre: »les bons pâtiront pour les mauvais »!
Par un itinéraire, et solidement encadré: sentiers, chemins de champs, ils vont marcher, certains pieds nus ou mal chaussés dans les champs moissonnés ou chardons et autre épines vont agrémenter la plante des pieds de ces malheureux!
Au bout d'un km et demi, ils arrivent au train, composé d'environ 50 wagons de marchandises, y montent parfois difficilement.
Le convoi s'ébranle à 4h.30 en direction de Dijon., et c'est aussi à cette heure que le s Feldgendarmen retournent à Beaune. Le train s'arrête à Longvic, où il va stationner tout la journée du 22 août sous une chaleur torride .Les déportés sont conduits à la prison de Dijon .La nuit arrive,l'inquiétude est à son comble. Dans les cellules, où l'on ne peut dormir, malgré la fatigue, des cris d'angoisse se font entendre: les plus jeunes appellent leurs mères!
Mercredi 23 août matin:des détenus, du haut du couloir qui conduit aux cellules, nos otages aperçoivent le jeune A.B. notre jeune milicien qui discute avec les Allemands. Négocie-t-il quelque chose? Toujours est-il que 12 hommes sont libérés, les plus jeunes et les plus âgés. Ils regagnent Comblanchien, à pied jusqu'à Gevrey Chambertin, et, de là en camionnette.
Les autres sont conduits à la caserne Krien, lieu de regroupement de tous ceux, paraît-il, qui partent pour l'Allemagne.
Et là, deux femmes courageuses de Comblanchien, Marie Sachot qui habite ici et Renée Lefils, belle soeur d'André Lefils fusillé en avril 1942, dont je vous ai parlé, apportent vêtements et chaussures à ceux qui en sont dépourvus, et tentent de persuader les Allemands que les 11 hommes qui vont partir, ne sont pas des « terroristes ».
Départ pour l'Allemagne. Le train est bombardé à Fauverney. Un des otages profitant de la situation s'évade. Arrêt à Dole, un autre otage prétextant qu'il a soif, obtient de la sentinelle l'autorisation de sortir du wagon, et sort tranquillement de la gare.
Ils ne sont donc plus que 9 à arriver en Allemagne. Certains sont logés dans des camps, où ils effectuent, dans de mauvaises conditions des travaux pénibles '
chargements ou déchargements de matériaux divers. Par contre, d'autres travaillent de leurs métiers. Ainsi, le coiffeur du village exerce à Nüremberg, le fils du boulanger, le plus jeune (18 ans) exerce à Vienne. Il va livrer du pain, parfois en traversant le Danube avec une barque.. Il peut sortir le dimanche. Tous rentreront, certains très fatigués et malades en mai et juin 1945.
Voyons maintenant, le cas des habitants qui ont échappé aux incendiaires et assassins. Ils se sont réfugiés dans les vignes et champs de cassis ou jardins situés à la périphérie du village. Et là dans l'anxiété et dans la peur,recroquevillés entre 2 ceps, ils assistent à l'incendie d'une partie du village. . De temps à autres, des gerbes d'étincelles, provoquées par la chute des toits dans les brasiers montent au ciel. Sinistres feux d'artifices. Pour ajouter encore à la peur, des rafales de balles percutent le sol ça et là. En effet,ces projectiles sont tirés par des mitrailleuses installées par les Feldgendarmen de Beaune en différents lieux. L'horloge communale continue d'égrener les heures, et semble donner un message d'espoir quant à la suite des évènements.
Et puis le jour se lève, moment à la fois tant espéré et redouté. Sont-ils encore là? Des têtes émergent au-dessus des rangs de vignes ou de cassis, et telles des girouettes, scrutent les alentours. Et Là, dans ce quartier de la place, des gens, les yeux hagards vont et viennent. Certains sont peu habillés, des femmes en combinaisons, des hommes en pyjamas. On va voir ce qu'il reste de son logis, des ruines encore fumantes desquelles émergent ça et là, un vélo, un lit de fer.... A peu de distance d'ici, c'est la carcasse d'un cheval que son maître n'a pas eu le temps de détacher, car les bourreaux arrivaient par le fond de la cour!
Et puis la solidarité va s'organiser. Le Secours National de Beaune organisation vichyste créée pour venir en aide aux victimes des bombardements , aux prisonniers, ouvre une antenne à Comblanchien, ici, dans cette salle qui va servir de restaurant. On y fait la cuisine dans une petite pièce, équipée, comme l'était les cuisines des années 1930. Un local est ouvert dans les dépendances du château Missol, situé derrière la Poste aujourd'hui. On y distribue des vêtements
Toutes ces activités sont animées par de jeunes bénévoles non sinistrés de Comblanchien et des villages voisins
Des quêtes, en espèces et nature sont faites aussi.
Et le gros de l'affaire, ce sont 200 personnes qui ont tout perdu, qu'il faut reloger,, chez des parents, des amis, dans le villages ou dans les environs.
A la fin de l'année 1945, début 1946, le MRU met à la dispositions des sinistrés, des baraques en bois, d'une trentaine de m2, constituées de panneaux en à double cloison, le tout monté sur un vide sanitaires. Elles sont montées sur le domaine privé ou public ( 4 sur la Place). Devenues inutiles , petit à petit, elles sont enlevées en 1952.
A 7h.30 , ce mardi 22 août 1944, de nombreux habitants assistent à l'incendie de l'église. Des volutes de fumée noires et grises sortent des abats-sons du clocher. Le feu provoqué par des balles qui se sont logées dans la charpente, et qui a couvé toute la nuit se déclare, et, rapidement les quatre poutres du clocher tombent sur le reste de l'édifice. La cloche tombe et met le feu aux portes extérieur et intérieur du bâtiment, qui, elles mêmes transmettent le feu aux bancs et chaises. Une équipe de volontaires, ainsi que le curé de Corgoloin font une chaîne avec des seaux d'eau, et pénètrent dans l'édifice par la fenêtre de la sacristie en descellant un barreau. Très rapidement, l'incendie prend de l'ampleur, et il faut abandonner. La reconstruction se terminera en 1955.
Et puis, le tragique bilan tant redouté apparaît au fil des heures de la matinée:. Les cadavres des 8 victimes sont conduits dans la salle de la mairie.
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Les obsèques ont lieu le mercredi 23 août après-midi. La cérémonie se déroulent à la fois à l'extrémité de la rue nouvelle et sur la place, en présence d'une foule considérable venue de toute part.
Dans la nuit du 5 au 6 septembre, la garnison allemande du château s'enfuit, et, le 8 septembre, c'est l'arrivée des éléments de la 1° armée française.
Alors, bien sûr, la vie continue. 52 maisons et bâtiments agricoles sont à reconstruire Quelques maisons pour des raisons diverses ne seront pas reconstruites, et l'on peu considérer que cette reconstruction a été terminée en 1955.
LA MEMOIRE
Chaque année, depuis 1945 a lieu une cérémonie commémorative. Le 21 août 1948 est inauguré le monument commémoratif sur la place de l'église. Ce monument érigé par souscription a été réalisé par des bénévoles, après leur journée de travail.et gratuitement
En 1983, les noms, des martyrs de ces douloureuses années a été donné a des rue et impasses
En 1994 :1995, j'ai écrit un livre sur cette nuit tragique, en collaboration avec Marcel Vigreux, professeur , à l'époque, d'Histoire contemporaine à l'université de Dijon.
Des expositions ont été aussi réalisées à l'occasion du cinquantenaire et du soixantenaire des évènements.
Quant aux bourreaux et incendiaires, voici ce que les archives militaires de Le Blanc m'ont répondu://////lettre du 17 janvier 1995
Notre jeune miliciens A.B. et ses parents ont été tués, après le 21 août 1944, par des résistants.
On peut regretter, avec le temps qui passe, la disparition des témoins, une baisse de la participation à ces cérémonies du souvenir. Les jeunes générations ne prennent pas toujours le relais, et c'est parfois difficile d'entendre, qu'elles ne se sentent pas concernées."
14:39 Publié dans A COMBLANCHIEN | Lien permanent | Commentaires (0)